En publiant les chiffres de l’activité du logement neuf en Gironde sur la période du 3ème trimestre 2023, l’Observatoire immobilier du Sud-Ouest (OISO) confirme, certes, la présence d’un dysfonctionnement inquiétant du marché, mais apporte aussi d’intéressantes précisions à un moment où le terme de « crise » aurait tendance à effacer toute nuance. 


Avant même de se pencher sur les niveaux d’activité des différents marchés de Gironde, il importe, et l’OISO apporte cette précision utile, de comprendre que la hausse des taux d’intérêts a réduit la capacité d’achat des candidats à l’acquisition entre 2022 et le 3ème trimestre 2023. Cette perte est estimée  à 85 000 € pour un ménage standard – 2 adultes et un enfant – gageant 4 500 € nets/mois (6ème décile) souhaitant acquérir un 3-pièces sur la métropole. Avec un taux d’intérêt assurance comprise, sur 25 ans, un apport de 10 % et un taux d’endettement de 33 %, la capacité de financement est ainsi passée de 385 000 € à 300 000 €. Cette donnée apporte un éclairage essentiel – même si ce n’est pas le seul – à l’absence actuelle de dynamique du marché du logement neuf. 

Christophe Duportal – OISO – novembre 2023

Gironde : baisse des mises en vente, chute des ventes

Si l’offre commerciale poursuit sa progression (+ 8 %) par rapport au 3ème trimestre 2022, deux paramètres ne trompent pas sur la tendance : les mises en vente poursuivent leur baisse (-45 %) et les ventes dévissent avec seulement 314 lots vendus (-56 % sur une année glissante), dont 70 % à des propriétaires occupants. C’est dire que les investisseurs, « confrontés à des problématiques de financement », précise Orianne Esvan directrice de l’Observatoire Immobilier du Sud-Ouest, quittent progressivement le marché puisqu’il ne représentent plus que 29 % des acheteurs, contre 52 % il y a un an. Le nombre de retraits, c’est-à-dire « le nombre de logements dont la commercialisation a été suspendue ou arrêtée définitivement », s’élève sur un an à 494 unités contre 198 en 2022. Pourtant, ce chiffre important doit être interprété avec prudence, comme le souligne Orianne Esvan : « Cela ne veut pas forcément dire que les appartements ne seront pas construits. Certains opérateurs ont retiré des logements dans le cadre de rachats par CDC Habitat et Action Logement sous formes de ventes en bloc. Ces logements qui ne sont plus offerts à la vente classique pourraient ainsi réapparaître dans les statistiques au 4ème trimestre 2023 ». 

Bordeaux Métropole et Bassin d’Arcachon en sens contraires ?

La métropole enregistre un recul de 57 % des mises en vente sur une année glissante et de 61 % des ventes. La baisse est telle qu’au 3ème trimestre, les opérateurs de la place ont réalisé 202 ventes, soit 67 par mois contre 173 au 3ème trimestre 2022. Parmi l’offre commerciale de la métropole, 70 % se situe à Bordeaux même, qui ne compte que 53 ventes au 3ème trimestre. Durant la même période, le Bassin d’Arcachon a semblé retrouver quelques couleurs. Après un « rebond d’activité » au 2ème trimestre 2023, la dynamique se poursuit au 3ème trimestre avec 65 lots vendus, soit à un niveau supérieur de Bordeaux. L’offre du bassin progresse avec 615 lots disponibles. Pourtant, de là à penser que ce marché longtemps atone suit une trajectoire encourageante, il y a un pas qu’il convient de ne pas franchir : « L’alimentation du marché est principalement produit par trois opérateurs, indique la directrice de l’OISO. Ce marché reste particulier, avec des prix élevés, certains logements pouvant être supérieurs à 8 000 €/m2 ( une moyenne de 5 614 €/m2 en augmentation de 10 % sur une année glissante). L’offre commerciale progresse et se traduit partiellement en ventes , mais les prix élevés indiquent que les acheteurs ne sont pas nécessairement soumis aux contraintes des crédits ». Si le Bassin d’Arcachon présente toujours un profil atypique – ou qui, plutôt, lui est typique – l’évolution des prix sur le département de Gironde ne montre aucun fléchissement pour l’instant : + 7 % sur un année glissante, à 5 090 €/m2 parking inclus, + 4 % sur la métropole à 5 045 €/m2, + 5,8 % à Bordeaux à une moyenne de 5 272 €/m2 (avec une légère baisse par rapport au trimestre précédent) : « Compte tenu de la hausse des coûts de construction, de la progression des normes et du niveau des taux d’intérêts, on ne voit pas comment les prix pourraient baisser dans le neuf », poursuit la directrice de l’OISO. 

BRS : un segment qui s’amorce

Cette fois-ci, il semble bien que l’offre de logements en Bail réel Solidaire, à des prix inférieurs de 25 à 30 % au prix du marché (hors redevance) commence à se matérialiser. Parmi les lots vendus en Gironde, 37 l’ont ainsi été en BRS, dont 12 sur la métropole et même deux sur le Bassin d’Arcachon. Ces logements en accession sociale, généralement proposés par des bailleurs sociaux, participent à l’offre de logements aidés, dont font partie les logements à prix maîtrisés et les logements en PSLA. En perte de vitesse dans la nouvelle offre, ces derniers se situent cependant, au niveau des ventes, au même niveau que les BRS. 

Si ce 3ème trimestre reste pour le moins morne, rien ne permet pour l’instant, dans l’attente d’éventuelles mesures de soutiens demandées avec insistance par les acteurs du secteur, de connaître précisément les contours des prochains mois.