Maître Frédéric GIRAL, Président de la Chambre des Notaires et Maître Henri Chesnelong, notaire délégué au Droit immobilier ont commenté et analysé les chiffres récents de l’immobilier pour la période courant du 1er juillet 2021 au 30 juin 2022.

Il cite « La stagnation annoncée pour cette fin d’année n’est pas surprenante car cela fait deux ans que nous atteignons des volumes de vente records et des augmentations de prix sur toutes les catégories de biens. Même si le marché reste encore très actif, il y a, petit à petit, moins de biens disponibles. Ce qui nous fait penser que nous devrions entrer dans un « marché de nécessité » plus qu’un marché d’investisseurs » explique Me Frédéric Giral.


En chiffres

Le volume annuel des ventes, tous biens confondus sur la période étudiée reste à la hausse (+7,8%) mais par catégorie de biens, cette augmentation est beaucoup plus mesurée exception faite des terrains à bâtir. Sur 12 mois, on comptabilise en Haute-Garonne 15 100 ventes d’appartements anciens (pour 14 100 sur la même période en 2021*), 6 800 ventes d’appartements neufs (pour 6 200*), 12 500 ventes de maisons anciennes (pour 11 900*) et 2 800 ventes de terrains à bâtir (pour 2 300*).

Appartements anciens : volumes et prix se stabilisent

Le prix médian en Haute-Garonne sur cette catégorie de biens s’établit à 2 860 € (2 730 € en 2021) avec une évolution annuelle des prix à + 4,9% (+6,1% en 2021). Sur l’appartement ancien et la seule ville de Toulouse, l’augmentation des prix sur la période est de 2,3% (8,4% précédemment). Le prix médian au m2 passe à 3 210 € soit quasiment le même qu’à la période précédente (3110 €). « C’est dans les préfectures voisines que les prix ont vraiment continué à augmenter » souligne Me Henri Chesnelong.

Pour la troisième année consécutive des villes comme Montauban présentent des augmentations à deux chiffres (+10,1%). Rodez connaît également une hausse des prix sur l’appartement ancien de +11% tandis que Cahors est soumis à un phénomène de rattrapage avec des prix s’affichant à + 17,5%.

« C’est indéniable, nous constatons des effets de déplacement de population vers les préfectures régionales. Grâce à des politiques de ville de plus en plus attractives pour les populations, ces agglomérations proposent souvent des seuils de rentabilité très intéressants pour les investisseurs, d’où leur dynamisme » expliquent les notaires. Il est à noter que la typologie des biens les plus recherchés ne change pas : à 36% il s’agit de T3, 32% pour les T2.

Par quartiers toulousains, les cinq quartiers traditionnellement les plus chers (+ de 5 000 € le m2), Saint-Etienne, Saint-Georges, Capitole, Carmes et Saint-Aubin enregistrent pour la première fois une légère baisse de leurs prix allant de -1% à -4,6%. Cette stagnation fait dire à Me Frédéric Giral que le marché a sans doute atteint son « plafond de verre » même si ces variations ne sont pas encore significatives. Car certains autres quartiers connaissent en contrepartie des augmentations de prix assez notables comme Patte d’Oie +10,7 %, Casselardit +7,2% ou Sauzelong-Rangueil qui avec ses +11 % semble bénéficier de « l’effet téléphérique ».

Appartements neufs : l’écart de prix avec l’ancien est de plus en plus serré

Si on observe et compare la courbe des prix des appartements anciens et neufs, on constate à quel point l’écart se resserre : un delta de seulement 1 300 € qui peut désormais interroger les acheteurs. Même si le prix médian au m2 dans le neuf s’établit à 4 200 €, les biens les plus prisés (en majorité les 3 pièces) présentent l’avantage de répondre aux dernières normes environnementales tandis que dans l’ancien, même avec un prix moins élevé, un acheteur doit désormais compter avec l’augmentation du coût des matières premières et l’envolée des prix à la rénovation.

Ceci étant dit, la pénurie de l’offre dans l’appartement neuf fait aussi que le marché de l’appartement ancien reste actif.

Maisons anciennes : un marché toujours attractif

Sur le marché de la maison ancienne, les prix affichent en Haute-Garonne une augmentation encore supérieure à 2021 soit +6,1% avec un prix médian à 275 800 €. La typologie des maisons recherchées par les acquéreurs ne change toujours pas : les 4 pièces représentent 37% des ventes, les 5 pièces 28% ; les grandes maisons préservent leur marché et représentent 21% des transactions.

« Le marché de la maison ancienne confirme le basculement observé d’après crise sanitaire. Contrairement à il y a 10 ans où l’on avait tendance à revenir dans les villes, désormais on souhaite souvent les quitter ! » observe Me Giral. « On voit même apparaître des « secundo-accédants » qui avec les plus-values réalisées sur un bien vendu en ville font l’acquisition d’une grande maison à l’extérieur ».

On notera qu’avec un prix médian à 118 400 € le département de l’Ariège connaît une augmentation de prix de 12,8% sur la maison ancienne (attractivité de la basse-Ariège notamment).

Sur l’agglomération toulousaine, Balma arrive toujours devant la ville rose avec un prix médian à 450 900 € (+1,8%). Toulouse est à 392 100 €, Pibrac à 375 400 € et l’Union à 361 700 €. On notera quelques augmentations de prix conséquentes sur des communes comme Saint-Jean (+15,1% et 309 300 € en prix médian), Labarthe-sur-Lèze (+16,9% et 292 300 €), Merville (+17,4% et 281 000 €) ou encore Lherm (+16,9% et 260 000 €).

Le marché des terrains à bâtir

Avec une évolution des prix par transaction à la baisse (-5,1%) on pourrait penser que le prix médian est devenu très intéressant (86 300 €) mais l’étude de ce marché occupé principalement par des primoaccédants révèle que la superficie des parcelles est de plus en plus petite : à 32%, elles font moins de 600m2, à 29% entre 600 et 899 m2.

Il est à noter par ailleurs une très grande différence de prix sur les terrains entre la Haute-Garonne (86 300 € en prix médian) et les autres départements qui constituent un tout autre marché (pour comparatif, prix médian à 48 000 € en Tarn-et-Garonne et 35 100 € en Ariège).

Durée de détention des biens et âge des acquéreurs

« Nous entrons désormais dans un marché d’utilisateurs plus que de spéculateurs » complète Me Frédéric Giral. Il se confirme que c’est toujours la tranche d’âge 30/49 ans qui est la plus active du marché immobilier. On note d’autre part en clin d’oeil que la tranche des moins de 30 ans est intéressée par des secteurs d’habitation complètement opposés au plus de 60 ans ! A 20,3% les moins de 30 ans achètent à Toulouse tandis qu’ils sont 3,7% à investir sur le secteur de Bagnères de Luchon. Les plus de 60 ans font le choix à 32,9% d’investir dans le secteur de Bagnères de Luchon plutôt qu’à Toulouse où ils ne sont que 8,5%.

Que nous réserve la fin de l’année 2022 ?

Si les avant-contrats confirment une dynamique il faut s’attendre à un ralentissement ou du moins à une stagnation des transactions dès la fin de cette année. Les notaires estiment qu’il va être plus compliqué d’acheter en raison de l’économie monétaire et des nombreuses causes conjoncturelles : l’augmentation des taux, l’inflation, le contexte international, la crise énergétique … et également le moral des Français dont le baromètre annoncé à la baisse est traditionnellement un indice des freins à la prise de décisions d’achat.

Me Giral évoque également en conclusion la question de la capacité d’accéder au marché du crédit et l’impact du Taux d’usure appliqué par les banques, taux qui s’établit aujourd’hui à 2,57 %. « Ce taux devrait être relevé par Bercy au 1er Octobre. Si le contexte que nous traversons s’annonce difficile, le désir d’accéder à la propriété reste intact. Et en temps de crise, la valeur pierre s’est toujours révélée la plus sûre ! »